Prise de parole : la « voix » de la réussite

06/01/2022
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Notre voix, loin d’être anecdotique, impacte l’image que nous renvoyons et notre relation aux autres. Elle peut nous rendre attirant ou agaçant, ennuyeuse ou charismatique, adorable ou détestable. Mais est-ce une loterie génétique ?

Quand la voix rend riche

Selon l’Université de Californie, les individus aux voix graves gagneraient mieux leur vie. Des chercheurs ayant analysé la voix de 800 chefs d’entreprise ont ainsi montré une corrélation entre le salaire et le timbre de la voix : les chefs d’entreprise aux voix les plus graves gagnent 187 000 dollars de plus par an que ceux aux voix les plus aigües.

L’explication ? L’« effet de halo », un biais cognitif qui nous pousse à juger la personnalité ou la performance d’une personne à partir d’une caractéristique. C’est ce biais qui nous pousse à croire qu’un individu à la voix grave est plus compétent et, ce faisant, nous conduit à le valoriser davantage financièrement. Et ce préjugé, bien sûr, ne fait qu’aggraver le sexisme puisque les femmes ont naturellement une voix plus aigüe. C’est d’ailleurs ce qui avait poussé Margaret Thatcher à travailler sa voix pour la « masculiniser » et ainsi gagner en crédibilité auprès des électeurs. 

La voix : naturelle ou culturelle ?

Mais alors que faire si nous n’avons pas la voix grave ? Comment faire en sorte que notre interlocuteur dépasse ses préjugés ? Il faut d’abord se rappeler que le para-verbal ne se limite pas à la hauteur de voix. Le volume, le débit, l’intonation, les silences ou encore l’articulation jouent tout autant dans notre charisme. Cela peut d’ailleurs avoir un rôle lors des entretiens d’embauche comme le souligne cet article de Welcome to the jungle.

En outre, il est possible, à l’instar de Margaret Thatcher, de travailler notre voix. En effet, même si la différence entre les hauteurs des voix féminines et masculines s’explique par un facteur anatomique (la longueur et l’épaisseur des cordes vocales), notre voix semblerait également due à un apprentissage genré. Plusieurs études réalisées entre 1999 et 2017 ont ainsi montré que, dès la petite enfance, les garçons et les filles avaient tendance à accentuer les traits sexués de leur voix pour se rapprocher des normes culturelles de genre.

D’après Hartmut Traunmüller, on constate par ailleurs des différences de fréquences vocales selon les pays. Ainsi, les femmes suédoises s’exprimeraient avec une voix plus grave que les femmes allemandes. Et la différence de fréquence entre les femmes et les hommes serait moins grande chez les Anglais que chez les Français. Plus étonnant encore : en Chine, les hommes parlant le dialecte wu auraient une fréquence de voix très proche de celle des femmes.

Trouver sa voix

Il est donc bel et bien possible d’apprendre à moduler notre voix pour la rendre plus grave ou plus aigüe, ce que nous faisons tous les jours de manière plus ou moins consciente lorsque nous considérons que la situation l’exige. Une étude allemande de 2017 a d’ailleurs montré que la voix des femmes avait baissé d’un demi-octave en vingt ans : un changement qui trouverait son origine dans l’évolution des rôles sociaux et notamment l’accession des femmes à des postes de pouvoir. Il faut aussi rappeler que notre voix évolue naturellement, devenant plus grave à mesure qu’avec l’âge, le larynx descend.

Mais en définitive, le plus important n’est pas d’avoir une voix grave, claire ou voilée. Si les voix « standards » plaisent, des voix « atypiques » comme celle d’un Garou ou d’une Vanessa Paradis peuvent être tout autant appréciées. Ce qui compte véritablement, c’est d’assumer sa voix, cette voix chargée de notre vie, de nos expériences, de notre éducation, de nos émotions. Cette voix qui évolue au cours de notre vie, qui nous traduit, qui parfois nous trahit. Cette voix qui, parce qu’elle sait s’adapter, participe aussi de notre intelligence relationnelle.

Alors « changer sa voix », pourquoi pas, mais surtout « trouver sa voix » !

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Formatrice en communication orale.