Parler en public : savoir capter les signaux faibles
Et si l’on revenait sur les mots ”prise de parole” ? A force de les entendre, ils nous induisent en erreur, et contribuent à augmenter le stress.
En effet, ”prendre la parole” n’engage que vous, l’orateur, alors que l’objectif est de susciter l’intérêt chez autrui. La parole est alors un moyen pour atteindre cet objectif.
Si vous voulez susciter l’intérêt, l’enjeu pour vous n’est pas seulement de bien parler en public. Il est aussi d’être bien entendu, pour être écouté, compris, et ainsi emporter l’adhésion. Si vous êtes uniquement focalisés sur votre discours, votre stress augmente. Si vous savez mesurer l’écoute de l’auditoire, alors il baisse.
En effet, l’incertitude sur l’attention ou l’intérêt de votre public peut être à la source de votre stress.
Imaginons que tout le monde vous écoute… Tandis que vous parlez, comment pouvez-vous savoir avec certitude que les gens vous écoutent et suivent votre pensée ? Vous le savez quand les auditeurs vous regardent, et que leurs yeux vous suivent quand vous bougez. Et c’est encore mieux s’ils font de petits signes d’approbation ou d’encouragement avec la tête.
Or, vous ne pouvez obtenir de l’écoute que si vous en donnez.
Créer les conditions d’une écoute mutuelle
L’écoute est en effet une transaction physique d’échange. C’est un réflexe humain. En dehors de tout discours, de toute compréhension, l’écoute sollicite d’autres canaux que l’intelligence.
Il suffit de capter le regard de quelqu’un pendant une à trois secondes, ni plus ni moins. Ce contact visuel est perçu par votre interlocuteur comme une demande relationnelle. Il vous répond en vous regardant attentivement. Ce regard partagé signifie qu’il vous écoute. La parole est à vous.
Cette transaction, pour être valable et enregistrée comme telle par les deux parties, doit se faire en silence. Voilà à quoi servent les silences nichés au sein de votre discours. Ils donnent du confort à votre interlocuteur qui vous le rend. Vous n’avez plus qu’à démarrer votre prise de parole puis la ponctuer par ces petits moments d’écoute physique pure.
Fort de cette relation sans cesse réinstallée, vous vous sentez sécurisés. Vous sentez que vous êtes écoutés. Votre cerveau n’a plus à gérer le stress de ne pas l’être. Il peut se consacrer entièrement au discours. Vous déroulez ainsi vos idées clairement, avec toutes les chances de convaincre.
“Prendre la parole” serait donc un terme incomplet ? Nous pourrions dire “écouter l’écoute pour mieux prendre la parole”. Ce n’est pas très heureux, admettons-le… Alors gardons “prise de parole”, en étant attentif au jeu à deux qui doit s’opérer !